Être en relation pour adoucir son sentiment de culpabilité
Être en relation c'est prendre un temps pour s'arrêter ensemble. Que cela soit assis l'un près de l'autre, debout plus ou moins face à face, allonger dans un lit, tout dépend du contexte. C'est ne rien faire d'autre que de s'écouter, se toucher, se masser, se caresser, donner à l'autre de son écoute, de son attention, de sa présence, de sa sensibilité, de ses talents dans tel ou tel domaine, de sa sécurité, de ses compétences, de sa capacité à se responsabiliser… C'est d'être attentif à ce qui se passe en soi quand l'autre nous parle dans une activité simple ou pas qui fait plaisir aux deux ou dans une activité familiale.
Je parle de famille et cela me fait penser à une famille que j'ai visité au Brésil il y a quelques années. Ce qui me frappait c'était que personne ne s'interrompait. Tous les gens présents écoutaient la personne qui parlait tant que celle-ci n'avait pas fini. Pour moi c'était vraiment délicieux et éveillait beaucoup de respect d'être là avec eux.
Être en relation c'est de se donner de l'importance et de donner de l'importance à la personne qui est avec nous d'une manière ou d'une autre.
Être en relation pour la personne au prise avec un sentiment de culpabilité persistant c'est vraiment salutaire. C'est un moyen très important souvent nécessaire pour se faire du bien. La personne qui vit un sentiment de culpabilité douloureux n'aura pas nécessairement besoin de solution dans un premier temps, même si l'envie d'extirper son malaise peut parfois être assez fort. Elle aura surtout besoin d'une présence, de ne pas se sentir seule, d'avoir quelqu'un témoin de son mode intérieur très inconfortable. Des fois c’est une écoute simple qui va être favorable, des fois c’est d’être serré dans des bras réconfortants, d’être massé avec une présence chaleureuse, avec tendresse…
Ce qui me touche profondément dans l'accompagnement d'une personne prise en relation dans son sentiment de culpabilité, c'est comment elle peut résister à s'exprimer et être profondément émue à l'idée de se donner cette importance. Ce n'est pas rien de dire à son enfant, sa conjointe, un ami : "Je me sens coupable quand tu dis cela et je me fais de la pression pour combler ton besoin" "Je pense que tu as des attentes sur moi et je me sens déjà coupable de ne pas les comblées" "Cela se sert en moi quand tu me dis que tu aimerais être aussi bien qu'avant avec moi, je me sens déjà pas adéquat, j'ai peur de te décevoir..." "Je me sens pas correct et j'aurais envie de fuir pour moins souffrir" C'est vraiment intime de partager cela, surtout quand la personne n'est pas habituée de le faire. Elle parle de ce qui se passe réellement en elle. C'est tout un dépassement de s'impliquer de la sorte.
Pour la personne qui écoute se sera de gérer son impuissance à entendre l'autre dans sa culpabilité sans piste pour l'instant pour s'en déprendre. De développer de l'empathie, de se mettre dans la peau de l'autre et d'écouter ce que cela éveille de sensible en soi, de sensations physiques, d'émotions ou de spiritualité… De chercher à faire du bien en suivant son rythme, sa créativité et sa manière de faire sans se bousculer. D'être là pour et avec l’autre.
Je vais vous parler brièvement de moi comme thérapeute pour vous partager mon expérience. Souvent quand j'aide quelqu'un qui vit beaucoup de culpabilité c'est ma présence, ma sensibilité et ma reconnaissance à travers tout ce que la personne dit et vit qui va l’aider. J'entends la culpabilité de mon client pour laquelle je vais exprimer ma sensibilité, mais je suis aussi à l'écoute de tout ce qu'il exprime. Dans la situation où il a vécu de la culpabilité il aura pu faire preuve de courage, de persévérance, de sens de responsabilité, d'intelligence… d'humilité à m'en parler. Je donne alors un feedback sensible à cela : de la reconnaissance, ma joie, d'être impressionné, ému… J'existe avec ma sensibilité qui ne touche pas directement son sentiment de culpabilité. Et ma sensibilité va nourrir mon client et lui fera du bien aussi par rapport à son sentiment de culpabilité parce que durant toute la rencontre il portera ce sentiment tout au fond de lui-même.
Ma profonde acceptation du vécu de mon client va l'aider également.
Et surtout j'ai à faire attention pour ne pas glisser dans le projet que sa culpabilité parte immédiatement, de trouver un truc sur-le-champ pour qu'il ne vive plus ce malaise.
Parfois une personne a besoin d'accueillir une douleur pendant des heures afin de trouver la bonne solution. Si durant ce temps elle en parle, reçoit de la sensibilité, de l'écoute, de l'empathie, de la reconnaissance, des encouragements, cela va l'aider à poursuivre son chemin pour se créer avec sa douleur. C'est en général plus doux et moins souffrant de vivre cela accompagner et surtout cela aide la personne à rester dans un espace créatif avec son sentiment de culpabilité.
Suite à un conflit où la personne se sent très coupable, elle se refermera bloquant tous chemins de relation avec son conjoint, enfant... S'en défendant parfois par des reproches, du mépris ou de la méchanceté pour garder l'autre à distance. Je suis très emphatique à combien c'est inconfortable et décourageant d'être pris dans ces défensives. Elle peut alors avoir besoin de parler à une personne de confiance (ami, collègue, parent..) afin dans un premier temps de se réouvrir le coeur, pour reprendre contact avec sa sensibilité, sa vitalité afin d'y voir plus clair. Elle peut aussi écouter quelqu'un d'autre ou faire une activité physique ou autre, nourrir une passion afin de se décoincer de sa culpabilité. Cela l'aidera à revenir par la suite en relation le coeur ouvert, plus léger et plus joyeux avec la personne concernée. Ce sera alors sa responsabilité d'offrir sa disponibilité à la personne concernée pour reparler de la situation où elle s'est sentie coupable pour tenter de se faire du bien et de faire du bien à l'autre. Ce sont tous ses efforts relationnels faits souvent avec courage qui vont graduellement adoucir le sentiment de culpabilité, le rendre moins dramatique, moins intense et même en arriver, par moments, à être complice avec l'autre face à son sentiment de culpabilité.
Le sentiment de culpabilité est là, l'accepter pour ne pas ajouter de son propre jugement ou rejet ou dévalorisation. Il est là, l'accueillir dans un premier temps et si possible en relation.